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Éditorial n° 46

 

La Nouvelle-Calédonie est à l’heure de Bougival, cette commune des Yvelines où des femmes et des hommes de bonne volonté venus de notre archipel des antipodes ont réussi à établir un compromis pour déterminer leur avenir commun. En couverture du présent numéro de la Revue juridique, politique et économique de Nouvelle-Calédonie, nos lecteurs peuvent contempler l’hôtel Hilton de Bougival où se sont réunis pendant une dizaine de jours les délégations calédoniennes pour parvenir à leur accord.

En invitant, après l’échec des discussions à Déva à Bourail, les délégations politiques calédoniennes à Bougival, le ministre d’État, ministre des Outre-mer, Manuel Valls, ne s’était pas découragé, continuant sans cesse à jouer son rôle de médiateur entre les uns et les autres. Et il a réussi, en obtenant le 12 juillet 2025, la signature des 18 participants, validant ainsi un accord après dix jours d’échanges. Il est vrai qu’un épisode confus et peu glorieux fut ensuite marqué par la défaillance du FLNKS « nouveau ». Celui-ci désormais animé par la radicalité extrémiste de ses nouveaux adhérents, (essentiellement la CCAT de l’Union Calédonienne) désavoua les membres de sa délégation et exigea qu’ils renient leur propre signature du document auquel ils avaient bien adhéré « en l’état ». Il n’en reste pas moins que l’Accord de Bougival recueille l’adhésion de toutes les forces politiques de Nouvelle-Calédonie sauf une, même si d’une part celle-ci prétend s’exprimer au nom du « peuple kanak », alors qu’elle ne saurait en avoir le monopole et même si d’autre part elle ne cesse de dénoncer un prétendu « passage en force » ce qui est une contre vérité manifeste puisque l’accord sera soumis au vote du corps électoral de Nouvelle-Calédonie comme l’exige la Constitution. Les Calédoniens décideront du sort de l’Accord de Bougival, il n’y a pas de passage en force dans la République française.

Malgré ces quelques turpitudes, cet accord a été publié au Journal officiel de la République française du 6 septembre lui donnant ainsi une validité officielle.

Que la prise en compte du régime institutionnel soit une nécessité absolue, c’est une évidence, mais il n’en demeure pas moins que la situation économique calédonienne est absolument catastrophique. Un certain nombre de responsables politiques indépendantistes semblent ne pas en prendre la mesure. Il convient pourtant de tenir compte des réalités, surtout si elles sont alarmantes. L’économie relève toujours, pour l’essentiel, de la confiance.

C’est en grande partie à cause de cette économie qui a la plus grande peine à se relever que nous avons invité nombre d’auteurs à réfléchir à ce sujet. Cependant, le concept d’économie ne semble pas être partagé par de nombreux responsables politiques qui pensent qu’avec une indépendance, tout sera résolu par des aides internationales multiples. Il ne faut pas oublier d’observer aussi la situation politique en métropole où la succession accélérée des Premiers ministres témoigne des difficultés redoutables du régime dans la présente situation. Celle-ci, qui semblait particulièrement désavantageuse pour la Nouvelle-Calédonie semblerait, avec la prise de position sans ambiguïté du Premier ministre Sébastien Lecornu envers la Nouvelle-Calédonie, maintenir une pression auprès des parlementaires pour entériner le « dégel » du corps électoral calédonien. Le chef du gouvernement lors d’un entretien télévisé du 8 octobre tenait les propos suivants : « J’ai dit à chacune des forces politiques que je voyais trois urgences : un budget pour l’État, un budget pour la sécurité sociale et les textes sur la Nouvelle-Calédonie. Puisqu’à 18 000 km d’ici, nous avons une situation institutionnelle qui ne peut pas attendre ». Une nouvelle ministre des outre-mer, Madame Naïma Moutchou, a désormais la tâche de conduire à bon terme le calendrier très serré du processus prévu par l’Accord de Bougival.

 Dès octobre, la proposition de loi organique visant à reporter le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie pour permettre la mise en œuvre de l’accord du 12 juillet 2025 a été majoritairement votée au Sénat. Par contre à l’Assemblée nationale, l’obstruction des députés LFI par le dépôt de plus de 1 600 amendements, a entraîné le dépôt d’une motion de rejet du texte qui, adoptée, permet de renvoyer immédiatement vers une commission mixte paritaire.

Nos lecteurs retrouveront les autres rubriques, doctrine, libres opinions, bibliographie, etc. qui complètent notre panorama semestriel.

Je souhaite aux divers observateurs de la Revue juridique, politique et économique de Nouvelle-Calédonie une bonne lecture, une bonne réflexion… et de l’espoir.

  

Robert Bertram,
Directeur de la RJPENC